Le pinceau ira jusqu’à la racine des choses.
Zao Wou Ki
Au bord du papier, le bol. Offrir au ciel l’ombre terre, l’ocre corps, le vert pluie, le bleu aube, l’encre nuit.
A genoux, abaisser le pinceau encré, qu’il serpente à bout de bras, fouaille en grande foison, lacis serré
de radicelles diffuses, le papier mouillé.
Pieds nus, s’ancrer au sol
de papier, en pleine arborescence de nuées, de sarments, de membres et d’eaux mêlées. Tenu de la main gauche, le bol
sera le pivot suspendu d’une danse sismographique. Gorger le pinceau pour allonger, énergique,
un trait embranché, un arc tendu.
D’un geste le ramener au bol, qu’il replonge, éperdu en piqués saccadés, qu’il virevolte
sur pointe, s’appesantisse en rase-mottes,
reprenne de la hauteur, assoiffé, s’abreuve encore et encore pour zébrer le paysage qu’il survole,
de longues traînées verticales. C’est alors
le moment, dans un dernier passage,
d’un coup sec du poignet, de balancer au vol, une crépitante pluie feuillage.
May Livory, plasticienne-poète, 23 janvier 2009